MP3-Fervaal-Vincent D'indy

Action musicale en trois actes et un prologue.

Jean Mollien (Fervaal), Micheline Grancher (Guilhen), Janine Capderou (Kaïtou), Pierre Germain (Arfagard), Jean Michel (Ferkemnat), Joseph Peyron (Chennos), Christos Grigoriou (Geywhir), Gustave Wion (Berddret), Lucien Lovano (Gwellkingubar). Chœur et Orchestre Radio-Lyrique de la RTF, dir. Pierre-Michel Le Conte (live, 22 mars 1962).

Compte rendu sur L'Avant-Scène Opéra

La princesse sarrasine Guilhen soigne son ennemi Fervaal, le chef des Cravann, et succombe à son regard. Comme Isolde. Le druide Arfagard invoque la déesse Kaïto, qui annonce la fin d'une ère. Comme Wotan et Erda. Fervaal n'assurera le salut de son peuple que s'il résiste à la chair. Comme Parsifal. La mort de Guilhen le fera entrer dans la lumière. Comme celle d'Elisabeth. Si, avec tout ça, le livret de d'Indy n'est pas wagnérien... Et sa musique, nourrie de leitmotive... C'est l'époque où l'on assaisonnait le monde de l'Allemand à la sauce gauloise. Les critiques se déchaînaient souvent, ne voyant que psittacisme là où il y avait chef-d'œuvre. Comme Le Roi Arthus, Fervaal en est un. Partition ambitieuse, d'une puissance épique, où une passion digne de Tristan jette d'ardentes flammes, Fervaal ne fut guère ressuscité depuis sa création par André Messager à la Monnaie de Bruxelles puis à l'Opéra Comique.

On saluera donc cette captation du concert de la RTF du 22 mars 1962 : elle a le mérite d'exister, au moins comme version d'attente. C'est que les coupures ne se comptent pas, de tout le Prologue jusqu'à des scènes entières. Avouons aussi qu'une intégrale eût dépassé les forces en présence. Pierre Michel Le Conte et l'Orchestre Radio-Lyrique ont de l'énergie, mais ne nous restituent pas pleinement l'orchestre de d'Indy. Les trois protagonistes, excellents représentants de l'école française de l'époque, s'attaquent à trop forte partie, surtout Jean Mollien, qui n'est pas le ténor héroïque de Fervaal. Il faudrait pour le druide Arfagard un baryton plus puissant que Pierre Germain. Guilhen éprouve moins Micheline Grancher, même si elle y atteint ses limites là où l'on attend un grand falcon, et Janine Capderou impressionne en Kaïto surgie des brumes. Ils ne ménagent pas leurs forces et déploient un enthousiasme qui finit par nous emporter, d'autant plus qu'ils sont stylistiquement orthodoxes. Donc trois cœurs quand même, ne serait-ce que parce que, même très abrégé, désormais Fervaal ne se réduit plus pour nous à l'Introduction du premier acte que nous avaient révélée, avant Rumon Gamba, Charles Münch, Pierre Monteux... ou Thomas Schippers.
DIDIER VAN MOERE